Montréal, le 2 juillet 2019 – Alors que sévit une pénurie de logements dans plusieurs villes au Québec, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) tire un bilan sévère des approches adoptées par les instances publiques. Selon l’organisme, bien qu’insuffisante, le gouvernement Legault et l’administration Plante auraient pu éviter bien des angoisses à des centaines de locataires si l’aide finalement accordée était arrivée plus tôt. Il rappelle que dès l’automne dernier, la Société canadienne d’hypothèques et de logement avait confirmé la rareté des logements locatifs dans la plupart des grandes villes québécoises.
Selon les chiffres compilés par le FRAPRU, plus de 500 ménages locataires ont demandé de l’aide, ne parvenant pas à se trouver un logement, même à quelques jours du 1er juillet. Loyers trop chers ou refus de louer faute de cote de crédit suffisante, absence de logements familiaux ou encore discrimination des familles avec enfants ou des personnes racisées, sont autant de situations vécues par des ménages au cours des dernières semaines. Le 1er juillet, 175 ménages étaient toujours sans logis, dont 45 hébergés temporairement par les villes.
À Gatineau, là où le taux d’inoccupation des logements locatifs est particulièrement bas, suite aux inondations et aux tornades des dernières années, 46 ménages ont fait appel aux groupes communautaires et à l’Office d’habitation de l’Outaouais. Finalement, le 1er juillet, 17 étaient toujours sans logis et 6 sont en hébergement temporaires. À Sherbrooke, un service d’aide coordonné a été rapidement mis en place; 29 ménages y ont fait appel. Hier en fin de journée, 15 ménages étaient toujours sans logement et hébergés par la ville. À Laval et à Longueuil, respectivement 15 et 19 ménages ont fait appel aux ressources municipales et communautaires; parmi eux, 13 sont toujours sans logis. À Drummondville, 11 ménages ont recouru au service d’aide mis en place. À Québec, le nombre de ménages ayant demandé l’aide de l’Office municipal d’habitation a été presque 3 fois plus élevé que l’an dernier.
C’est à Montréal que la situation a touché le plus de locataires. Près de 300 ménages ont fait appel à l’Office municipal d’habitation. Plusieurs n’ont reçu pour toute aide, jusqu’à la veille de la longue fin de semaine, que des listes de logements à louer, le plus souvent trop chers pour les ménages à faible revenu. À la fin de la journée, hier, l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM) indiquait que pas moins de 98 ménages étaient toujours sans logis et hébergés par la ville.
Le FRAPRU rappelle que mercredi dernier, la mairesse de Montréal, suivie de près par la ministre responsable de l’Habitation, ont déclaré l’une et l’autre qu’il n’y avait pas de crise du logement. Pourtant, à ce moment-là, le FRAPRU recensait près de 200 ménages québécois toujours en recherche de logement. Mercredi soir, le gouvernement du Québec a finalement annoncé un programme d’aide d’urgence, incluant des sommes pour héberger les ménages sans logis, pour entreposer leurs biens et des suppléments au loyer d’urgence pour les aider à trouver un logement, leur loyer étant en partie subventionné. Malgré l’adoption de ces mesures, plusieurs locataires ne se sont vu offrir de l’hébergement temporaire que le 28, le 29, voire le 30 juin.
Vendredi dernier, à la veille de la longue fin de semaine, pas moins de 230 ménages étaient toujours en recherche de logement, dont une centaine à Montréal. Depuis, ce nombre n’a pratiquement pas baissé, puisque, dans la majorité des cas, les locataires n’ont toujours pas eu accès aux suppléments au loyer d’urgence. Selon le FRAPRU, si ces subventions avaient été attribuées rapidement, bon nombre de locataires auraient déjà pu trouver un logement et signer un bail; ils n’auraient pas eu besoin d’hébergement et surtout, l’anxiété aussi violente qu’inutile qu’ils ont vécu leur aurait été épargnée. L’organisme craint par ailleurs que nombre d’entre eux ne soient tombés à travers les mailles du filet et ne se trouvent encore aujourd’hui en situation précaire, comme des colocations forcées, voire dangereuses, ou encore pris avec un loyer exorbitant qu’ils ne pourront pas payer l’année durant.
Le FRAPRU déplore le déni affiché initialement par certaines autorités, puis les délais de mise en œuvre des mesures d’urgence; il craint que des gens n’aient été ainsi jeté sur le chemin de l’itinérance. « On a l’impression que le gouvernement du Québec et certaines villes n’ont pas pris au sérieux la situation, alors qu’on dit depuis des mois qu’il faut se préparer à y faire face. Cette situation a fait en sorte que des groupes communautaires ont dû pallier à l’inaction de l’état, in extremis, pour que personne ne passe sous la radar et finisse sur le trottoir avec leurs meubles », s’indigne Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU.
Le regroupement de défense du droit au logement dénonce par ailleurs la discrimination effrontée que des familles ont subi ces dernières semaines. Il demande à Québec de revoir les recours des locataires en pareille situation.
À court terme, le FRAPRU espère que ce bilan sévère permettra de réajuster le tir au cours des prochains mois.
Afin d’éviter que la pénurie de logements ne perdure et qu’il y ait une alternative au marché privé qui s’avère trop onéreux pour plusieurs, le regroupement revendique que le gouvernement du Québec relance la production de logements sociaux, en utilisant notamment une partie des surplus budgétaires dont il dispose. Il lui demande également d’officialiser sans plus attendre les améliorations promises au programme AccèsLogis, tel qu’annoncées dans le budget du 21 mars dernier. Enfin, il interpelle le gouvernement fédéral pour qu’il signe une entente avec le gouvernement du Québec, afin que celui-ci puisse bénéficier de sa part des sommes prévues dans la Stratégie canadienne sur le logement.
Quant à la Ville de Montréal, le FRAPRU l’invite à revoir à la hausse ses objectifs de développement de logements sociaux. « Valérie Plante doit reconnaître la crise vécue par un nombre croissant de locataires de sa ville; cela nécessite des actions ambitieuses et elle doit réclamer plus de fonds provinciaux et fédéraux pour la construction de logements sociaux », conclut Céline Magontier, responsable des dossiers montréalais au FRAPRU.
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Informations et demandes d’entrevues :
Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU : Bureau : 514 522-1010 ; Cellulaire : 418 956-3403
Céline Magontier, responsable des dossiers montréalais au FRAPRU : Bureau : 514 522-1010 ; cellulaire 514 850-1431