Pour une politique globale en habitation

Vu la vitesse avec laquelle la situation des locataires se dégrade et avant que des tors irréparables ne soient commis, le FRAPRU remet à l’ordre du jour sa demande : Québec doit se doter d’une Politique en habitation, qui oriente les interventions de l’État en matière de logement.

La Politique en habitation revendiquée par le FRAPRU est basée sur trois principes :
• la reconnaissance formelle du droit au logement;
• la protection et le développement du logement social;
• une meilleure protection des droits des locataires.


Reconnaitre formellement le droit au logement
La reconnaissance formelle et explicite du droit au logement lierait moralement, sinon juridiquement, le gouvernement du Québec. Ce faisant, il serait tenu d’adopter et de soutenir des politiques et des programmes assurant le droit au logement pour tous les ménages québécois, quel que soit leur revenu. Ces derniers disposeraient de leviers politiques et légaux pour l’interpeler, voire le poursuivre, en cas de déni de leur droit à un logement convenable.
Certes, l’effet ne serait pas miraculeux, les recours juridiques, si on y arrive, peuvent être longs et coûteux. Mais la démarche aurait l’avantage de placer l’État à la défense des plus vulnérables et d’inviter la population à se souder autour d’un principe évident de justice.


Protéger et développer le logement social
De toute évidence, le marché privé ne veut et ne peut répondre aux besoins des ménages à faible ou à modeste revenu, du moins, pas sans l’aide de l’État. Son objectif est plutôt la rentabilité.
Les membres du FRAPRU ont donc la conviction que pour assurer le droit au logement de toutes et de tous, il faut développer des logements sociaux, à l’abri de la logique du profit.
À l’heure actuelle, le logement social ne représente qu’environ 11 % du parc de logements locatifs du Québec. De plus, à cause des pressions exercées par la pénurie de logements ou par leur financiarisation, le parc de logements locatifs privés encore abordables se ratatine à vue d’œil. Conséquence : plus de 195 000 ménages locataires doivent consacrer la moitié ou plus de leur revenu au logement et la moitié d’entre eux ont un revenu total de moins 13 673 $ par an*.


II est donc urgent de soutenir les projets des coopératives, des OSBL et des offices d’habitation qui visent à loger à long terme, des ménages mal-logés par le marché. À l’heure actuelle, des projets totalisant près de 7000 unités espèrent une révision du programme AccèsLogis, nécessaire à leur aboutissement. Des communautés comptent sur le financement du gouvernement pour que puissent sortir de terre quelque
10 000 autres logements. Le FRAPRU, quant à lui, demande des programmations d’au moins 50 000 logements sociaux en 5 ans. Sans tout régler, cela tracera la voie pour répondre aux besoins les plus urgents, dans un délai raisonnable.


Mieux protéger les droits des locataires
On assiste actuellement à toutes sortes d’abus sur le marché locatif : augmentations vertigineuses et injustifiées de loyer; discriminations sans gêne et collectes abusives de renseignements personnels; entretien négligent, voire mise en danger de la santé d’autrui; évictions illégales, sous de faux-prétextes; etc. Les locataires les plus pauvres et les plus vulnérables sont à haut risque de se retrouver sans toit ou en colocations contraintes, potentiellement dangereuses.

L’État doit mettre un terme à tout cela, en resserrant ses contrôles sur le marché locatif. Il doit mettre en place un registre des loyers, obliger les propriétaires à justifier leurs augmentations de loyer, adopter un règlement national de salubrité, pour que les locataires puissent faire valoir leurs droits à des conditions de logement décentes**. Il doit interdire la transformation de logements locatifs en condos ou en hébergement touristique et pénaliser les promoteurs et propriétaires délinquants pour les dissuader d’agir de la sorte.


La balle est dans le camp de la ministre responsable de l’Habitation.

Le logement abordable n’est pas nécessairement social, ni abordable

Les logements sociaux sont sans but lucratif, à propriétés collectives et logent indéfiniment des ménages à faible et à modeste revenus. Ils sont subventionnés et les locataires y exercent un contrôle sur leurs conditions de logement.
La notion de logement abordable est floue et élastique. Ce qui est abordable pour la classe moyenne, ne l’est pas pour les gens pauvres. L’État soutient le privé pour construire du logement dit abordable, mais ses critères changent, fixés tantôt en fonction de la capacité de payer des ménages, tantôt en fonction du loyer médian du marché. Mais le plus dommageable, c’est que les engagements du privé sont à durée déterminée.
À l’automne 2021, des journalistes ont démontré que des logements dits abordables subventionnés par le fédéral, se louaient en moyenne 2020 $ par mois, à Montréal.

* Source : Statistique Canada; Recensement de 2016.
** À l’heure actuelle, moins de 10 villes québécoises ont un tel règlement, que les locataires peuvent évoquer devant le Tribunal administratif du logement, pour obtenir des travaux ou des compensations financières.