Montréal, le 11 décembre 2025 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) remarque, à la lumière du Rapport sur le marché locatif publié ce matin par la SCHL, que le coût du logement continue de grimper en flèche au Québec, même si l’offre de logements augmente à 2,7 %, cette hausse étant encore plus forte dans les régions métropolitaines de Gatineau (3,8 %) et de Montréal (2,9 %). Selon Véronique Laflamme, porte-parole de l’organisme, « la crise du logement en est maintenant une d’abordabilité, les locataires devant en moyenne payer 62,1 % de plus pour se loger au Québec qu’à l’arrivée au pouvoir de François Legault en octobre 2018, dont 10,1 % de plus qu’en 2024 ». La conclusion est sans appel selon elle : « miser sur la construction de logements locatifs chers — option clairement privilégiée par tous les paliers de gouvernement — ne règle rien. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La seule voie crédible pour affronter une crise d’une telle ampleur, c’est d’investir massivement dans le logement social accessible aux locataires à faible et modeste revenu et d’imposer un contrôle beaucoup plus serré du marché privé ».
Le FRAPRU souligne que l’augmentation de loyer de 10,1 % vécue au Québec entre 2024 et 2025 est beaucoup plus élevée que l’Indice des prix à la consommation (dont la variation annuelle a été de 3,2 % pour la même période). Le rapport de la SCHL établit que le loyer mensuel moyen au Québec est maintenant de 1232 $. Le FRAPRU souligne qu’un ménage locataire doit disposer d’un revenu d’au moins 49 240 $ par année pour payer un tel loyer, sans dépasser la norme des 30 % de revenu consacrés au logement, alors que la moitié des locataires du Québec ont un revenu inférieur à cela.
Survol de la situation
L’organisme de défense du droit au logement ajoute que la situation est encore pire dans certaines régions. Sur l’Île de Montréal, le loyer a augmenté de 11,9 % entre octobre 2024 et 2025 pour atteindre 1283 $, ce qui nécessite un revenu annuel de 51 320 $ pour ne pas se retrouver en difficulté. Le taux de logements inoccupés qui y était de 2,0 % en 2024 est maintenant de 3,1 %. D’après la SCHL, c’est dans la gamme de loyers la plus élevée que le taux de logements inoccupés est le plus haut, à 4,5 %, alors qu’il est de 0,8 % dans la gamme la plus basse. Par ailleurs, le loyer des logements inoccupés, les seuls à la disposition des ménages à la recherche de logements, est de 1573 $ à Montréal contre 1275 $ dans les logements déjà occupés, un niveau déjà largement inabordable pour de trop nombreux locataires.
Le reste de la région métropolitaine de Montréal n’est pas épargnée. À Laval, si le taux de logements inoccupés est monté à 3,4%, la hausse de loyers a été de 8,3 % en un an, pour atteindre 1347 $ par mois. Sur la Rive-Nord, l’augmentation a été de 6,2 %, alors que la proportion de logements vacants est de 2,5 %. Sur la Rive-Sud, où le taux de logements inoccupés atteint 2,5%, le loyer moyen a bondi de 8,5 %.
Dans la région métropolitaine de Québec, le taux de logements inoccupés a monté à 2,4 % , alors que le loyer moyen, lui, a augmenté de 9,7 %, pour atteindre 1227 $. Le revenu nécessaire pour payer un tel loyer sans dépasser le taux d’effort de 30 % est de 49 080 $. Là aussi, le taux de logements inoccupés est anémique dans les appartements les moins chers (1 %), mais atteint 4,9 % dans les plus coûteux. Quant aux logements inoccupés, leur loyer moyen est de 1488 $ contre 1220 $ pour les logements occupés.
Les loyers les plus élevés parmi les régions métropolitaines du Québec demeurent à Gatineau. Le loyer moyen atteint à présent 1420 $ par mois, soit 6,8 % de plus qu’en 2024. Il faut en moyenne un revenu de 56 800 $ pour payer ce loyer sans couper dans ses autres besoins essentiels. Le taux de logements inoccupés y atteint maintenant 3,8 %.
Dans les régions métropolitaines de Sherbrooke, Trois-Rivières, Drummondville et Saguenay, les loyers moyens ont bondi respectivement de 9,3 %, 15,2 %, 13,6 % et 11,2 %. Les taux de logements inoccupés y sont dans l’ordre de 2,7 %, 2,7 %, 1,8 % et 1,3 %. Saguenay est la seule région où le taux de logements vacants est en baisse.
Malgré la détente du marché locatif, plusieurs centres urbains sont encore aux prises avec d’importantes pénuries de logements locatifs. Ainsi, le taux de logements inoccupés – qui devrait atteindre 3 % pour que le marché soit considéré comme équilibré – est inférieur à 1 % dans certaines villes des Laurentides (Sainte-Adèle et Sainte-Sophie), du Saguenay-Lac Saint-Jean (Saint-Félicien et Dolbeau-Mistassini), en Abitibi ( Amos, Val-d’Or et Rouyn-Noranda), à Rivière-du-Loup et à Sorel-Tracy.
La crise de l’abordabilité
Selon le FRAPRU, les données de la SCHL sont une preuve supplémentaire que la crise du logement ne se réglera pas (voire va empirer), sans s’attaquer au problème majeur de l’inabordabilité. De récentes études de l’Observatoire québécois des inégalités sur les coûts sociaux et économiques de la crise du logement démontrent par ailleurs à quel point cette crise de l’inabordabilité coûte plus cher à la société que les investissements nécessaires pour la résoudre. « Aucune autre formule que le logement social ne permet de répondre à la fois à l’inabordabilité des loyers et aux besoins réels des locataires comme des communautés. Ce n’est pas une dépense, mais bien un investissement collectif », affirme Véronique Laflamme.
Pour cela, les gouvernements doivent, à son avis, concentrer les efforts vers du logement véritablement moins cher que les loyers médians du marché. Autrement, les rares fonds publics destinés au logement contribueront à perpétuer le problème. Le FRAPRU juge également urgent que le gouvernement Legault se dote d’un plan de développement du logement social sur plusieurs années. Il lui reproche de se contenter de formules n’offrant aucune garantie d’abordabilité immédiate des logements réalisés, en prétendant en faire plus, avec moins.
Le regroupement rappelle que les 10 000 logements sociaux et «abordables» présentement en réalisation au Québec sont le résultat d’investissements antérieurs, remontant souvent à de nombreuses années, mais qu’aucun investissement n’est prévu pour assurer que la construction de logements sociaux se poursuive à ce rythme. Véronique Laflamme ajoute que le gouvernement québécois semble avoir oublié ses responsabilités à l’égard du droit au logement : « On ne peut pas sous-traiter cela au secteur privé ou à d’autres acteurs. C’est au gouvernement d’avoir des politiques et des programmes garantissant sa mise en œuvre. C’est indécent qu’après 7 ans au pouvoir de la CAQ, il n’y ait toujours pas au moins un vrai programme de logement social qui fonctionne et que l‘inabordabilité se soit autant détériorée. »
À l’instar du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), le FRAPRU demande enfin la mise en place d’un réel contrôle des loyers, incluant un registre public des loyers et un gel des loyers jusqu’à l’atteinte de ce contrôle.
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Pour plus d’informations
Véronique Laflamme:
(514) 522-1010