Un budget fédéral à la croisée des chemins: Le FRAPRU réclame un virage pour le logement social

Montréal, le 28 octobre 2025 – À une semaine du budget fédéral du 4 novembre, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) presse le gouvernement canadien de donner à Maisons Canada les moyens et les balises nécessaires pour que les logements qu’Ottawa promet de construire soient réellement abordables immédiatement et sans but lucratif. L’organisme craint que le gouvernement Carney ne mise que sur des montages financiers complexes plutôt que sur des investissements structurants et des programmes capables de faire une réelle différence.

Le regroupement a fait connaître ses attentes devant le bureau de circonscription du ministre Steven Guilbeault, à Montréal, en demandant au lieutenant du Québec de les relayer. Il était accompagné des deux comités logements de la circonscription, le Comité logement Ville-Marie et le Comité logement Plateau-Mont-Royal, qui ont témoigné de l’urgence des besoins, rappelant que des investissements fédéraux mieux ciblés pourraient y répondre concrètement. « Ça prend des outils réellement adaptés aux objectifs pour assurer que des logements véritablement abordables lèveront de terre rapidement » a résumé Véronique Laflamme, la porte-parole du FRAPRU.

Investir les milliards à venir pour vraiment lutter contre l’inabordabilité 

Échaudé par l’absence de cibles précises quant à l’utilisation des milliards $ de fonds fédéraux destinés au logement depuis 2017, l’organisme redoute à nouveau un manque de planification, nécessaire pour contribuer à augmenter significativement l’offre de logements sociaux au Québec, comme ailleurs au Canada. Il lui demande de mettre en place les programmes nécessaires pour que Maisons Canada réalise son ambition affichée de construire des logements réellement abordables. Le FRAPRU rappelle que les milliards $ déjà dépensés dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement n’ont pas permis de freiner la crise de l’inabordabilité, ni celle de l’itinérance. Au contraire, certains de ces fonds ont contribué à l’aggraver en finançant des projets de logements dits “abordables” dont les loyers dépassent largement la capacité de payer des ménages locataires à revenu faible ou modeste. Les fonds tardivement dédiés réservés pour le logement social, sans but lucratif, ont été largement insuffisants.

Le loyer moyen au Québec a augmenté de 47 % depuis le début de la pénurie en 2018. Les logements neufs récemment construits contribuent à tirer les prix vers le haut, constate le FRAPRU. Les données le démontrent : favoriser la construction de logements beaucoup trop chers creuse encore plus les besoins des locataires et contribue à l’accroissement des inégalités sociales au Québec et au Canada. La théorie du ruissellement sur laquelle semble miser jusqu’ici le gouvernement risque fort de ne pas fonctionner ont rappelé les trois organismes de défense du droit au logement. Dans Ville-Marie, le taux d’inoccupation a dépassé 5 %, et sur le Plateau-Mont-Royal, il frôle le seuil dit d’équilibre à 2,7 %. Pourtant, les loyers demeurent inabordables et ne diminuent pas. Les locataires à la recherche de solutions sont de plus en plus nombreux à appeler les comités logement. « La crise en est une de cherté, les prix des logements disponibles démontrent l’échec du marché privé à répondre aux besoins essentiels en logement », résume Véronique Laflamme.

Pour le regroupement, il est impératif que chaque dollar à venir soit dorénavant consacré exclusivement au logement social. C’est la moindre des choses, selon le FRAPRU pour tenter de corriger le tir et sauver les meubles d’une stratégie qui, jusqu’ici, n’a pas rempli son objectif premier : réduire le nombre de ménages ayant des besoins impérieux de logement. « Il est inconcevable que les milliards $ encore disponibles, dans un contexte budgétaire incertain, soient dépensés ailleurs que là où il peut réellement faire une différence. Il faut concentrer les sommes dans la construction et la rénovation de logements sociaux, ancrés dans les communautés et à loyers vraiment abordables », insiste Mme Laflamme.  Ces investissements mieux ciblés sont nécessaires selon elle pour assurer la mise en œuvre progressive du droit au logement et prévenir l’itinérance.

Le logement social et communautaire est incontournable pour répondre aux besoins criants

Plusieurs des études récentes, comme celles de l’Association des groupes de ressources techniques du Québec (AGRTQ) publiées en 2025 sur les retombées sociales et économiques du logement social et de l’Observatoire québécois des inégalités sur les coûts de l’inabordabilité du logement, démontrent sans équivoque que le logement social est un investissement, pas une dépense. Pour que ces logements aient les retombées qu’on leur reconnaît, ils doivent bénéficier d’un financement adéquat, d’un ancrage communautaire fort et d’une gouvernance démocratique protégeant la pérennité de leur mission sociale. Conséquemment, les fonds fédéraux doivent être structurants. Le fédéral a déjà démontré par le passé qu’il pouvait bâtir un véritable patrimoine collectif, notamment par la création de logements publics à loyer modique (HLM), rappellent les organismes. La tendance à une approche mur-à-mur basée sur une ingénierie financière limitant au minimum les subventions gouvernementales annoncée dans la vision initiale de Maisons Canada risque d’achever le désengagement de l’État canadien si elle se concrétise, met en garde le FRAPRU.  En imposant des conditions intenables, voire irréalistes, on risque de limiter la possibilité de répondre aux besoins des locataires à faible et modeste revenus.

« Si le gouvernement Carney veut donner les chances à Maisons Canada d’atteindre les objectifs qu’il lui a fixé, il ne faut pas oublier encore une fois des programmes publics qui se suffisent à eux-mêmes et qui permettent de construire des logements sociaux immédiatement abordables pour les ménages à faible et modeste revenus, les ménages qui ont urgemment besoin d’être décemment logés », résume madame Laflamme. 

Le FRAPRU exhorte le lieutenant québécois du gouvernement et le ministre du Logement et à se faire les porte-voix des besoins criants du terrain. Pour se montrer à la hauteur de la crise, le 1er budget de François-Philippe Champagne doit:

  • Doter Maisons Canada d’un objectif de réalisation de logements sociaux et communautaires sur plusieurs années;
  • Prévoir des contributions gouvernementales suffisantes pour garantir des loyers réellement abordables, notamment en créant un programme spécifique de type HLM;
  • S’il n’a pas l’assurance d’y arriver à court terme, il devrait renflouer les programmes fédéraux existants destinés au développement de logements sociaux et communautaires, soit les sous-volet création rapide de logement et sans but lucratif du Fonds pour le logement abordable.
  • Réserver les terrains et bâtiments publics excédentaires destinés au logement en priorité à des logements sociaux et communautaires, que les terrains cédés aux porteurs de projets de logements sociaux le soient gratuitement ou à très faible coût et qu’ils soient décontaminés pour être prêts à construire.

« Le Canada a l’occasion de renouer avec son rôle historique de bâtisseur. Si le gouvernement veut vraiment répondre à la crise, il doit investir massivement dans le logement social et s’assurer de répondre aux besoins criants. C’est maintenant que ça se joue », conclut Mme Laflamme.

Pour lire le mémoire pré-budgétaire du FRAPRU: https://www.frapru.qc.ca/avis-pre-budgetaire-federal-2025/

-30- 

Informations et demandes d’entrevue:

Véronique Laflamme, cell.: 418 956-3403

Catherine Lussier, cell: 514 231-2309