Budget Girard – Le FRAPRU dénonce l’abandon du logement social en pleine crise du logement

Québec, le 22 mars 2022 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) réagit avec consternation au dernier budget déposé avant les élections générales par le ministre des Finances du Québec, Éric Girard. Alors que la pénurie de logements locatifs atteint presque tout le Québec, prenant en plusieurs endroits une ampleur dramatique, et que les loyers continuent de grimper en flèche, rendant intenable la situation des locataires à faibles et modestes revenus, le budget n’annonce le financement d’aucune nouvelle unité de logement social dans le programme AccèsLogis. « Comment le gouvernement Legault peut-il ignorer aussi grossièrement la crise du logement ? Comment peut-il abandonner ainsi des milliers de ménages locataires désespérés ? », a réagi la porte-parole du regroupement, Véronique Laflamme.

L’absence d’investissements pour la réalisation de nouveaux logements sociaux et communautaires dans le programme AccèsLogis, scandalise le FRAPRU qui y voit la preuve de son abandon par le gouvernement. Selon le regroupement, ça aurait été pourtant la façon la plus rapide de mettre rapidement en chantier des projets d’habitation sociale en attente de financement. Véronique Laflamme accuse le gouvernement de parler des deux côtés de la bouche : « la ministre de l’habitation, Andrée Laforest, continue d’affirmer qu’AccèsLogis se poursuit en complémentarité du nouveau Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ), mais le budget ne lui donne ni les moyens de finaliser enfin la totalité des milliers de logements déjà annoncés, qui sont bloqués faute d’un financement insuffisant, ni les moyens d’en réaliser d’autres ».

« Résultat : en quatre ans, le gouvernement Legault n’aura pas réalisé sa promesse électorale de livrer les 15 000 logements sociaux déjà prévus[1], comme la CAQ s’y est engagé en campagne électorale, et n’aura financé que 500 nouveaux logements sociaux, alors que des projets comptant pour un total de 10 000 logements sont en attente », résume la porte-parole du FRAPRU. « C’est scandaleux de constater à quel point le gouvernement minimise l’urgence des besoins », dénonce-t-elle. Pas moins de 38 000 ménages locataires à faibles revenus sont pourtant en attente pour une habitation à loyer modique.

Dans son plan budgétaire, le gouvernement affirme investir des sommes importantes pour augmenter l’offre de logements sociaux et abordables. Pourtant seulement 100 millions $ pour 1000 logements supplémentaires dans le nouveau programme d’habitation abordable (PHAQ) sont prévus d’ici 2026-2027. 247 millions $ ont également été budgétés pour compléter la livraison de 3 500 logements sociaux déjà annoncés. Alors que Montréal demandait 250 millions $ à cette fin, le plan budgétaire ne lui réserve que 30 millions $. « C’est tout simplement choquant ! Il faut le dire clairement : 350 millions $ pour construire des logements pour les ménages à revenus faibles et modestes, ce ne sont pas des sommes importantes; c’est très très loin de répondre aux besoins urgents et aux demandes répétées du milieu communautaire en habitation, et à celles du milieu municipal », dénonce la porte-parole du FRAPRU.

« Le gouvernement Legault refuse sciemment aux municipalités qui ont pris des engagements les moyens de les réaliser », constate Véronique Laflamme. Alors que l’Union des municipalités du Québec (UMQ) demandait le financement 4500 logements sociaux et de 13 400 « abordables» par année, « avec 1000 logements abordables dont une partie pourrait être sous forme de logement social ou communautaire, on est bien loin du compte », ajoute-t-elle. Le FRAPRU rappelle que, même si le premier appel de projets du nouveau programme pour lequel le mise à jour économique et financière  annonçait 2200 logements a finalement été lancé le 1er mars, celui-ci favorise le secteur privé et que les modalités qui se font toujours attendre, entraînent des embûches particulières pour les groupes mettant sur pied des logements sociaux et communautaires, forcés de revoir complètement leurs projets.

Dans ce contexte, le regroupement s’explique mal les choix du gouvernement caquiste, qui démontrent que les moyens ne manquaient pourtant pas. Il décaisse en effet 3,2 milliards $ dès cette année pour des chèques de 500 $, dont pourront bénéficier tous les adultes ayant un revenu de moins de 100 000$, pour faire face au coût de la vie. « On est aux prises avec un évident manque de volonté politique d’investir dans des mesures structurantes », dénonce Véronique Laflamme, qui critique le caractère électoraliste de cette mesure. « Ce n’est pas avec l’envoi d’un chèque, comme le prévoit le budget, que l’on va être en mesure de faire face à l’augmentation du coût de la vie, surtout que, dans le cas du logement, elle a des causes structurelles nécessitant à la fois un accroissement majeur de l’offre de logements hors marché, et un contrôle plus efficace des loyers », commente la porte-parole.

Privatisation de l’aide au logement dénoncée

Le budget confirme le virage majeur imposé par le gouvernement Legault en matière d’aide au logement, d’abord avec le PHAQ qui promet des subventions publiques aux promoteurs privés, sans fixer aucun objectif de logements sociaux à réaliser. « On met sur le même pied le secteur sans but lucratif, hors marché, qui ne répond pas à une logique spéculative et qui développe des propriétés collectives qui demeureront abordables dans le temps, et le marché privé », déplore Véronique Laflamme.

Le budget 2022-2023 prévoit le financement de 1600 nouvelles unités de supplément au loyer privé. Selon Véronique Laflamme, « le supplément au loyer privé, même s’il peut être utile en situation d’urgence, ne crée pas de nouveaux logements locatifs à bas loyer, alors qu’il en manque cruellement ». Elle précise qu’en situation de pénurie, de nombreux propriétaires refusent ces subventions parce qu’ils les trouvent trop contraignantes. De plus, avec les sommets qu’atteignent les loyers sur le marché privé, le FRAPRU s’inquiète que les fonds publics servent à subventionner des logements de plus en plus chers, qui n’ont en plus, aucun effet structurant.

Pour répondre aux besoins criants, le FRAPRU estime qu’il est plus urgent que jamais de lancer un grand chantier de 50 000 logements sociaux en 5 ans, dont 10 000 dès 2022-2023, autant sous forme de coopératives, que d’OSBL d’habitation et de logements publics. Il demande au gouvernement Legault d’ajouter des investissements supplémentaires immédiatement ainsi que d’adopter une politique globale en habitation basée sur la reconnaissance du droit au logement. Il annonce d’ailleurs la tenue d’une manifestation le 2 avril prochain à Montréal, afin de le lui rappeler.

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Pour informations et entrevues :

Véronique Laflamme, 418 956-3403 (cell.)


[1] Selon les derniers chiffres disponibles, sur les 15 000 logements qui était prévus à l’arrivée de la CAQ au pouvoir, il en resterait 9300 à livrer dont 4500 unités pour lequel le financement reste à compléter.