Le premier budget du gouvernement péquiste de Pauline Marois suit les traces du Parti libéral de Jean Charest. Il en est un d’austérité. Même si le ministre des Finances, Nicolas Marceau, aurait très bien pu retarder le retour à l’équilibre budgétaire, il a choisi de se faire le champion du déficit zéro, en maintenant l’objectif de l’atteindre dès 2013-2014, comme le voulait son prédécesseur libéral, Raymond Bachand.
Malgré un important manque à gagner, le gouvernement refuse d’aller chercher des revenus supplémentaires par le biais d’une fiscalité plus progressive. Le PQ a fait preuve d’une timidité déconcertante, en se contentant d’ajouter un seul palier d’imposition pour les contribuables ayant un revenu imposable de plus de 100 000 $.
Il avait pourtant pris des engagements plus ambitieux lors de la campagne électorale, comme l’imposition à 75 % des gains de capital (au lieu de 50 %), l’instauration d’un deuxième palier d’imposition additionnel ou encore la hausse des redevances minières. Le PQ a renoncé à instaurer ces mesures pour plaire au milieu des affaires et aux agences de notation. La mise en place de ces mesures et d’autres alternatives fiscales revendiquées par la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics aurait permis d’aller chercher plusieurs milliards de dollars supplémentaires. Par exemple, à l’heure où les grandes banques canadiennes engrangent profits records après profits records, pourquoi s’empêcher de réinstaurer la taxe sur le capital pour les entreprises financières ?
En lieu et place de mesures permettant une contribution plus équitable des particuliers à haut revenu et des grandes entreprises, le gouvernement Marois annonce les compressions budgétaires les plus importantes des quatorze dernières années. En effet, la croissance globale des dépenses prévues est de 1,8 %, alors que la moyenne des années 2003-2004 à 2009-2010 était de 5,8 %. Plusieurs ministères et organismes subiront des compressions importantes qui s’ajoutent à celles des dernières années.
Pour équilibrer son budget, le PQ poursuit également sur la voie de la tarification et cela, malgré les promesses contraires faites durant la campagne électorale. Il maintient donc deux des trois mesures de tarification régressives les plus injustes annoncées par l’ex-gouvernement libéral.
Ainsi, la taxe santé a tout juste été rafistolée pour la rendre un peu moins régressive. Elle demeurera tout aussi élevée (200 $ par an) pour une bonne partie de la population et à 100 $ pour les personnes ayant un revenu se situant entre 18 000 et 42 000 $ [1].
Le PQ confirme par ailleurs l’augmentation des tarifs du bloc patrimonial d’hydro-électricité, en remplaçant la hausse de 20 % en cinq ans prévue par l’ancien gouvernement par ce qu’il appelle son indexation au coût de la vie. Or, il s’agit malgré tout d’une hausse importante, puisque ces tarifs étaient gelés depuis la création de ce bloc patrimonial en 2000 et que la dite indexation s’ajoutera aux hausses des tarifs réguliers soumises annuellement à la Régie de l’énergie. La hausse des tarifs pèsera lourd sur les ménages à faible et à modeste revenus qui vivent souvent dans des logements mal isolés où ils doivent payer une fortune en électricité. En 2011, 50 649 ménages ont été l’objet d’une interruption des services de la part d’Hydro-Québec parce qu’ils n’arrivaient pas à payer leurs comptes. Leur nombre risque malheureusement d’augmenter si le gouvernement Marois ne recule pas.
Et les droits ?
En refusant de redistribuer la richesse, le gouvernement se prive également de moyens pour lutter contre la pauvreté et pour respecter les droits économiques, sociaux et culturels. Ainsi, les personnes à l’aide sociale doivent se contenter de l’indexation de leur maigre chèque qui ne respecte pas leur droit à un niveau de vie suffisant. Dans son discours du budget, le ministre Marceau annonce qu’il « présentera d’ici quelques mois de nouvelles orientations et un programme visant une plus grande participation au marché du travail des jeunes… et des prestataires de l’aide de dernier recours ». Or, lors du dépôt des crédits, le budget du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale a été amputé de 120 millions $ ! L’accès à l’aide juridique n’a pas non plus été amélioré. Pire, les crédits amputent son budget de 8 millions $.
Le budget Marceau démontre que le combat pour la justice sociale et fiscale ne s’est pas terminé avec le départ de Jean Charest. La lutte étudiante ayant illustré encore une fois que c’est par une mobilisation sans relâche qu’on obtient des victoires, nous nous reverrons sous peu… dans la rue!
Notes
[1] Les personnes gagnant moins de 18 000 $ sont exemptées. Sous le gouvernement libéral, le seuil d’exemption était de 14 895 $.