Bulletin 142- Logement social: la CAQ doit enfin livrer la marchandise !

Malgré la dureté de la crise du logement, les solutions concrètes pour y répondre n’ont pas occupé la place qu’elles auraient dues durant la campagne électorale. Réélu, François Legault a pris des engagements largement insuffisants.

Char allégorique présenté lors du lancement d’une tournée régionale, qui se terminera le 16 février 2023 devant l’Assemblée nationale.
Crédit photo: Jacynthe Morin

Sur sa promesse de 11 700 nouveaux logements sociaux et abordables en 4 ans, 4700 ont déjà fait l’objet d’annonces avant le déclenchement des élections; en fait, seulement que 7000 sont de nouvelles unités. De ce nombre, la part de logements sociaux reste toujours inconnue.
La CAQ laisse également planer l’incertitude sur l’avenir du programme AccèsLogis – le seul entièrement dédié au développement de logements sociaux – et son financement.
À de nombreuses reprises, les groupes communautaires en habitation, dont le FRAPRU, ont réclamé des investissements suffisants et récurrents dans le programme, notamment pour compléter la réalisation de tous les logements déjà programmés mais pas encore construits. Les résultats se font toujours attendre.
L’ancienne ministre de l’Habitation a répété souvent qu’AccèsLogis n’est pas mort, accusant même le FRAPRU d’être alarmiste quand il l’a interrogé publiquement sur le sujet; elle a précisé que le nouveau Programme d’habitation abordable – Québec (PHAQ), lancé à l’automne 2021, était complémentaire à AccèsLogis. Pour en faire la preuve, il faudra que le ministre des Finances annonce de nouveaux logements sociaux dans son budget 2023-2024.
Pour l’instant les groupes qui travaillent avec des requérantes et des requérants de logements sociaux, sont forcés d’attendre, en raison de l’absence de nouvelles programmations dans AccèsLogis et dans le PHAQ. Plusieurs coopératives, OSBL et offices d’habitation craignent que leurs projets ne puissent jamais voir le jour.

Une tendance dangereuse vers la privatisation
En lançant le PHAQ, le gouvernement a amorcé une dérive dangereuse vers la privatisation de l’aide au logement, puisqu’il offre maintenant du financement public – jusque-là réservé au secteur sans but lucratif – à des promoteurs privés. Ces promoteurs ont pour seule obligation de garder «abordables» 30 % des logements qu’ils construisent pendant un certain laps de temps, variant entre 10 et 35 ans, selon l’ampleur du financement public consenti. Aucune subvention au loyer pour des ménages à faible revenu n’est prévue dans le programme; les promoteurs – à but ou sans but lucratif – qui en veulent, doivent les demander à part et n’ont aucune garantie d’en obtenir.
La CAQ semble miser aussi sur l’offre de subventions au loyer versés directement à des propriétaires de logements locatifs disponibles, pour aider des ménages à faible revenu en attente de HLM. Or, il est connu et vérifié qu’en période de pénurie de logements, les propriétaires les boudent systématiquement, préférant choisir leurs locataires.
Enfin, Québec a versé 350 millions $ au Mouvement Desjardins et au Fonds de solidarité FTQ pour qu’ils réalisent 2000 logements, leur confiant l’élaboration de leurs propres programmes et la réalisation de projets de logements abordables.
Pendant ce temps, le doute continue de planer toujours sur l’avenir de plusieurs projets déjà déposés dans AccèsLogis, totalisant presque 9000 logements sociaux, tous budgétés avant 2018. La CAQ avait promis de les construire durant de son précédent mandat. Pour l’instant, les groupes attendent encore les sommes nécessaires pour boucler leurs budgets de réalisation. La nouvelle ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, qui a affirmé vouloir des résultats, a ici l’occasion de faire rapidement ses preuves en débloquant le dossier.
L’heure est à la mobilisation pour sortir la classe politique de son indifférence face aux effets dramatiques de la pénurie de logements locatifs et de la hausse fulgurante des loyers, et pour obtenir les investissements massifs qui s’imposent dans le secteur du logement social. Pour sa part, le FRAPRU continuera de se mobiliser pour la réalisation de 50 000 logements sociaux en 5 ans, sous différentes formes. Ceci inclut un programme d’acquisition de bâtiments résidentiels locatifs et leur socialisation, pour contrer efficacement l’effritement du parc de logements locatifs encore abordables et assurer le maintien dans leur milieu des ménages qui y habitent. Il faut aussi construire de nouveaux logements sociaux, notamment des HLM, pour lutter contre la rareté de logements qui sévit dans toutes les régions.
C’est ce qu’il mettra en lumière dans le cadre de sa tournée du Québec avec un char allégorique illustrant les besoins des mal logés et les projets de logements sociaux qu’ils réclament. La tournée se terminera à Québec, avec une manifestation nationale devant l’Assemblée nationale, le 16 février 2023.