Contre la violence faite aux femmes dans les logements

p-3_illustration_philippe-colasEn décembre 2015, le Centre d’éducation et d’action des femmes (CÉAF) a contacté le comité Femmes du FRAPRU pour faire le point sur la violence faite aux femmes dans les logements.

Depuis 2014, le CÉAF a en effet colligé une centaine de témoignages de femmes dénonçant des violences commises par leur propriétaire, gestionnaire de logement, concierge, co-chambreur ou voisin. Ces témoignages ont nourri leur photo-roman « Chaînes et résistance : contre les violences vécues par les femmes locataires », publié en juin dernier.

Un enjeu de société

Entrées par effraction, tentatives d’extorsion ou chantage, harcèlement, menaces, agressions sexuelles : les femmes se retrouvent trop souvent prisonnières de l’endroit qui devrait être, au contraire, leur hâvre de paix. Des rapports de pouvoir inégalitaires qui s’établissent entre les propriétaires, gestionnaires ou concierges et les locataires ou chambreuses – auxquels s’ajoutent les inégalités entre les sexes – enchaînent, emprisonnent et emmurent les femmes dans un cercle de violence dévastateur, duquel il est difficile de se sortir. Tant la loi du silence que la pauvreté contraignent les victimes à se taire, par peur de perdre leur logement.

De ce triste constat, le CÉAF et le comité Femmes du FRAPRU ont fait naître l’idée d’une journée d’échange et de réflexion sur cet enjeu, tenue le 21 avril dernier. Une vingtaine d’organisations qui s’impliquent sur les enjeux féministes ou de logement y ont participé. L’un des objectifs premiers de cette rencontre était de mettre en commun des outils et des ressources tout en identifiant les manques à construire. Elle a aussi mis en lumière qu’il fallait décloisonner nos interventions pour mieux lutter contre les problèmes que les femmes vivent tant comme femmes que locataires.

Bien que ces violences puissent toucher l’ensemble des femmes locataires, celles vivant dans des conditions économiques difficiles et les femmes faisant face à diverses oppressions sont particulièrement ciblées. Certaines conditions vécues spécifiquement par les femmes locataires ou chambreuses les exposent à des abus de la part de leur propriétaire, concierge, co-chambreur ou voisin lorsque ceux-ci outrepassent leurs droits. Notamment quand :

  • des propriétaires et concierges se donnent le droit d’utiliser leur double de clé pour accéder, en tout temps et sans préavis, au logement des femmes locataires;
  • des propriétaires, concierges, co-chambreurs ou voisins utilisent à mauvais escient des informations de nature privée au sujet des femmes locataires comme, par exemple, leurs habitudes, allées et venues;
  • des propriétaires, concierges, co-chambreurs ou voisins utilisent la pauvreté et la précarité des femmes locataires comme motif d’extorsion ou de chantage en vue de les contraindre à des relations sexuelles (par exemple, comme monnaie d’échange pour le paiement du loyer, en cas de retard de paiement ou en menaçant de les dénoncer à l’immigration).

dans l’espace privé, donc invisibles et méconnues de l’ensemble de la population. Afin que ces actes soient condamnés, il est nécessaire que leur caractère structurel et politique soit connu et reconnu, par la population et par le gouvernement.

Il a donc été décidé de mener une campagne contre les violences sexuelles vécues par les femmes dans le logement qui a été lancée le 16 septembre dernier, dans le cadre de la 35e Journée d’action contre la violence sexuelle faite aux femmes.

L’objectif de la campagne est d’obtenir des avancées tangibles. En effet, il serait assez simple de modifier le formulaire de bail pour que les locataires connaissent mieux leurs droits. Les propriétaires ou gestionnaires, dont les HLM, coops et OSBL d’habitation, devraient adopter, dans leurs règlements internes ou d’immeuble, la reconnaissance des violences spécifiques que subissent les femmes locataires, et mettre en place des mécanismes permettant de prévenir et combattre ces violences. Le prochain Plan d’action gouvernemental en matière d’agression sexuelle devrait reconnaître la gravité du problème et contenir une campagne publique de sensibilisation sur cet enjeu. Finalement, il est inacceptable que la liste des infractions donnant droit à l’indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC) n’inclut pas le harcèlement criminel et les menaces. Cette liste doit être actualisée pour refléter les modifications adoptées au Code criminel et l’IVAC doit permettre d’assumer les frais de résiliation de bail et de déménagement lorsqu’une femme est victime de violence.

La campagne compte une pétition en ligne sur le site de l’Assemblée nationale, marrainée par la députée Manon Massé, une déclaration à laquelle les organisations sont invitées à souscrire et diverses actions d’éclat et de sensibilisation. Elle culminera par la présentation officielle des appuis obtenus, le 6 décembre prochain, Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes.

Signer et diffuser la pétition

En ligne sur le site de l’Assemblée nationale : https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-6249/index.html

 

Endosser et diffuser la Déclaration contre les violences vécues par les femmes dans le logement

Vous pouvez ajouter le nom de votre groupe ou organisation directement en ligne à :

https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSe2D1cnoAif2Nm9MGnI-6euQrC9GwJYR8sLttMhDaP6wBeCGw/viewform?c=0&w=1

 

Pour de plus amples informations, suivez la campagne sur Facebook :

https://www.facebook.com/events/981912351931087/

par Émilie E. Joly, organisatrice communautaire au FRAPRU