Règlement pour une métropole mixte – Montréal: Ville inclusive ou exclusive ?

Montréal, le 24 octobre 2019 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) est entendu par l’Office de consultation public de Montréal (OCPM), cet après-midi, afin de présenter son mémoire au sujet du règlement pour une métropole mixte de la Ville de Montréal. En continuité avec la Stratégie d’inclusion en vigueur depuis 2005, ce règlement vise à améliorer l’offre de logement, en contraignant les promoteurs immobiliers à inclure des logements sociaux, abordables et familiaux dans leurs projets résidentiels, sans être limités aux projets nécessitant une modification dérogatoire. Bien que celui-ci représente une avancée selon le regroupement, il soulève questions et inquiétudes quant à sa capacité à répondre aux besoins des ménages montréalais, alors que 70% d’entre eux estiment que le logement est inabordable à Montréal[1].

Des objectifs d’inclusion de logements sociaux nettement insuffisants

Si l’administration Plante prévoit des pourcentages d’inclusion de logements sociaux et abordables légèrement rehaussés par rapport à ceux en vigueur dans la stratégie, elle continue de viser dans la même proportion l’abordable et le social. « Qu’on parle d’accès à la propriété ou de location, le volet abordable décrit dans le règlement n’en a que le terme », explique Céline Magontier, responsable des dossiers montréalais au FRAPRU. Ce que la Ville a d’ailleurs reconnu lors de la séance d’information organisée par l’OCPM, le 19 septembre dernier. « Le logement dit abordable ne l’est pas en réalité », poursuit Madame Magontier, ajoutant que « leurs loyers et les prix plafonds ciblés dans le règlement sont calculés en fonction du marché et non en fonction du revenu des ménages ».

Alors que 2/3 des ménages montréalais sont locataires et que près de 180 000 d’entre eux dédient plus de la norme de 30% de leur revenu pour se loger, avec un revenu annuel médian de seulement 18 812 $, le FRAPRU estime que seuls les logements sociaux peuvent répondre aux besoins de ces ménages. C’est pourquoi l’organisme est préoccupé par le peu d’ambition du règlement quant à la quantité de logements sociaux espérés par Montréal. « Avec un objectif aussi maigre que 20%, même en diversifiant les outils pour en développer davantage, l’administration Plante retarde la réalisation de son engagement électoral déjà insuffisant pour répondre aux besoins criants, et ne permet pas à Montréal de maintenir la mixité sur son territoire. Si on croit les projections de développement de logements sociaux décrites dans le document de présentation du projet de règlement, soit 600 annuellement, il faudra plus de 10 ans pour construire les 6000 logements sociaux promis et surtout pas moins de 145 ans pour répondre seulement aux besoins des 87 000 ménages qui engouffrent la moitié et plus de leur revenu dans le logement », dénonce Madame Magontier.

Des délais de mise en vigueur trop longs

Selon toute probabilité, la rareté de logements abordables constatée sur le territoire de la métropole perdurera encore quelques années, voire s’aggravera. Or, selon la porte-parole de l’organisme, « un tel contexte est synonyme de discrimination, d’évictions et d’exclusions des ménages locataires les plus vulnérables ». Notant que la majorité des logements construits ces dernières années le sont en condominium et en locatif neuf, inaccessible pour une part importante des locataires. Le FRAPRU rappelle qu’en novembre dernier, la Société canadienne d’hypothèques et de logement constatait que les logements construits après 2005 dans la région métropolitaine de Montréal se louaient en moyenne 358 $ plus cher que les autres, alors que le loyer moyen s’élevait à 1165 $.

Selon le FRAPRU, la rareté des logements et un développement immobilier visant les clientèles plus fortunées participent à une spéculation immobilière et foncière qui se traduit par la gentrification galopante des quartiers. « Cela exerce une pression de plus en plus importante sur le parc de logements locatifs, qui s’amenuise, menaçant le droit au logement et à la Ville des locataires à faible et à modeste revenus », s’inquiète sa porte-parole.  

Dans ce contexte, le FRAPRU comprend mal le choix de la Ville de reporter à 2021 la mise en vigueur de son règlement. « Si la Ville a enfin les pouvoirs de faire plus et mieux, elle doit avoir le courage de ses ambitions en prévoyant des objectifs d’inclusion de logements sociaux largement revus à la hausse et en mettant en vigueur son règlement dès son adoption. L’administration Plante ne doit en aucun cas ménager les promoteurs au détriment de la population montréalaise », conclut Céline Magontier.

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[1] Selon un rapport de la firme Forum Research, publié le 25 septembre 2019.