La crise du logement doit être une priorité du budget Morneau

Montréal, le 11 mars 2020 – Alors que le gouvernement de Justin Trudeau s’apprête à déposer son budget 2020-2021, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) presse le fédéral de contribuer à lutter contre la crise du logement qui sévit au Québec et dans plusieurs provinces. À l’instar de plusieurs grandes villes canadiennes qui ont multiplié les appels à ce sujet récemment, le FRAPRU demande au ministre des Finances de prévoir des investissements supplémentaires nécessaires à la réalisation de milliers de logements sociaux à travers le pays.

Le FRAPRU soutient que, malgré les 55 milliards $ budgétés par les Libéraux pour réaliser la Stratégie canadienne sur le logement, il est faux de dire que les investissements fédéraux en logement ont augmenté depuis 2017. S’appuyant sur un rapport du Bureau du Directeur parlementaire du budget1, le regroupement rappelle que la portion du budget consacrée aux programmes d’aide au logement destinés aux ménages ayant des besoins impérieux de logement diminuera au cours des dix années de la Stratégie. Elle serait de 325 millions $ (14 %) inférieure à ce qu’elle était au cours des dix années antérieures. Le bureau du Directeur parlementaire du budget parle même d’un « réalignement important des dépenses de la SCHL ».

Ce rapport précise également que parmi les engagements fédéraux annoncés dans le cadre de la Stratégie, « 12,2 milliards de dollars viennent d’engagements pris avant le budget de 2016 [et] 0,4 milliard de dollars, d’engagements pris dans le budget de 2016 », ces sommes représentant 45 % des investissements totaux prévus pour le logement abordable.

« Ce n’est pas pour rien que le Canada se retrouve en queue de peloton des pays de l’OCDE pour le faible pourcentage de logements sociaux; il n’investit pratiquement plus dans le logement social », souligne Véronique Laflamme, précisant qu’en se retirant de ce domaine en 1994, Ottawa a privé la population de centaines de milliers de logements coopératifs, sans but lucratif et publics. Dans un rapport déposé en mars 2016, le Comité de l’ONU sur les droits économiques, sociaux et culturels s’inquiétait déjà de la pénurie de logements sociaux au Canada et au Québec. Le FRAPRU estime que depuis, trop peu a été fait pour remédier à la situation.

Selon la porte-parole du FRAPRU, « les investissements actuels de la Stratégie nationale sur le logement sont mal-ciblés et ils aboutissent sur des logements hors de prix, qui ne suivent en rien à la capacité de payer des ménages locataires que le gouvernement dit vouloir aider ». Elle dénonce également les prêts à faible taux d’intérêt consentis au secteur privé qui ne pourront pas être contrôlés à moyen et long termes. Ce faisant, ils n’auront pas d’effet pérenne.

Le regroupement demande au gouvernement Trudeau de rectifier le tir dans son prochain budget. « Alors que la pénurie de logements locatifs entraine une aggravation rapide des problèmes de logement et d’itinérance, c’est immédiatement qu’il faut investir, pas dans dix ans, et il faut s’assurer que les sommes permettront de contrer les effets de la spéculation immobilière », insiste Véronique Laflamme. Selon le regroupement pour le droit au logement, la seule façon efficace et durable d’y arriver est en finançant le logement social.

Outre le manque de logements sociaux, s’ajoute le défi de la fin prochaine de l’aide fédérale accordée aux logements sociaux construits avant 1994, dont l’état lamentable de plusieurs d’entre eux inquiète sérieusement le FRAPRU et la Fédération des locataires de HLM du Québec (FLHLMQ). D’ici 2021, si Ottawa persiste à ne pas renouveler sa contribution, plus de 20 000 logements sociaux du Québec ne seront plus financés par le fédéral. Pour les conserver en bon état et garder leurs loyers accessibles financièrement pour les ménages à faible revenu, le fédéral doit maintenir un engagement budgétaire annuel de 300 millions $ pour le Québec. À cela, il faut ajouter les sommes requises pour remettre en état 3000 HLM qui ne sont déjà plus conventionnés et qui ont un besoin urgent de 100 millions $ pour être remis dans un état convenable, selon la FLHLMQ.

Le FRAPRU demande que 2 milliards $ par année soient immédiatement réservés à la réalisation de nouveaux logements sociaux, en plus des fonds nécessaires pour maintenir ou remettre en état ceux déjà construits. Il demande à Ottawa de signer rapidement l’entente découlant de la Stratégie sur le logement avec le Québec, afin que celui-ci ait sa juste part des fonds fédéraux et puisse les investir rapidement dans son propre programme de logement social.

-30-