Les loyers ont explosé sur le Plateau Mont-Royal, le nombre de locataires en grandes difficultés aussi

Montréal, le 15 janvier 2015 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) et le Comité logement Plateau Mont-Royal affirment que les loyers ont explosé dans ce quartier, depuis le début des années 2000, ce qui a fait augmenter le nombre de locataires en sérieuses difficultés financières. Les deux organismes basent cette affirmation sur des données inédites provenant de l’Enquête nationale auprès des ménages menée par Statistique Canada en 2011.

Marie-José Corriveau, responsable des dossiers montréalais au FRAPRU, précise que loyer médian a augmenté de 40 % sur le Plateau Mont-Royal entre 2001 et 2011, ce qu’elle relie au phénomène de « gentrification » connu dans le quartier: « En 2001, le loyer médian n’était que de 26 $ par mois plus élevé sur le Plateau qu’à l’échelle de Montréal. Dix ans plus tard, l’écart était rendu à 79 $ par mois, le loyer médian atteignant 763 $ sur le Plateau contre 684 $ à Montréal. L’attrait particulier que continue d’exercer le quartier sur des populations plus fortunées est directement en cause, puisqu’il provoque une intense activité immobilière et une rareté persistante de logements locatifs qui, à leur tour, contribuent à la hausse des loyers ».

Or, à 33 464 $ par année, le revenu médian des ménages locataires du Plateau Mont-Royal n’est pas de beaucoup supérieur aux 32 629 $ obtenus à la grandeur de la ville. La conséquence, c’est que davantage de locataires paient un loyer nettement exagéré par rapport à leur revenu. Ainsi, 18 115 ménages, représentant 44 % des locataires, consacrent plus que la limite de 30 % de leur revenu pour se loger sur le Plateau. De ce nombre, 11 015 en paient plus de 50 %, dont 6515 plus de 80 %.

Cette dernière statistique fait bondir Marie-José Corriveau : « Sur le Plateau, 16 % des locataires doivent, mois après mois, verser plus des 4/5 de leur revenu pour se loger, avec tous les effets que ça peut avoir sur leur capacité de subvenir à leurs autres besoins essentiels dont la nourriture. Il s’agit d’une augmentation hallucinante de 29 % par rapport à la situation vécue en 2006. L’embourgeoisement du quartier a un prix et les locataires à plus faible revenu en font les frais ». 

La porte-parole du FRAPRU en veut pour preuve la situation des personnes seules qui représentent la grande majorité des locataires du quartier et dont le revenu médian est d’à peine 22 537 $ par an. Plus de la moitié de ces personnes doivent payer plus de 30 % de leur revenu pour se loger et un sur cinq en engloutir plus de 80 %. Les ménages ayant immigré récemment au Canada sont également plus durement touchés, près du quart de ceux arrivés entre 2006 et 2011 consacrant plus de 80 % de leur revenu au loyer. Les loyers en cours sur le Plateau pénalisent également les locataires dont l’âge se situe entre 15 et 24 ans. Pas moins de 78 % de ces jeunes locataires paient plus que la norme de 30 % de leur revenu en loyer dont 43 % plus de 80 %.

Le logement locatif en grave difficulté

Pour sa part, Vicky Langevin, organisatrice au Comité logement du Plateau, souligne une autre donnée inquiétante de l’Enquête nationale auprès des ménages, soit la baisse du nombre de logements locatifs dans le quartier : « Entre 2001 et 2011, le nombre de logements locatifs est passé de 44 135 à 41 225 sur le Plateau Mont-Royal, pour une perte de 2910 appartements. Or, durant ces dix ans, le nombre de logements occupés par des propriétaires a pour sa part augmenté de 2690 ». Le pourcentage de ménages locataires est conséquemment passé de 78 % à 73 % dans le quartier.

S’appuyant sur des statistiques provenant de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, Vicky Langevin affirme que l’offre de logements locatifs est loin de s’améliorer sur le Plateau : «  Entre 2010 et 2013, à peine 46 logements locatifs privés et coopératifs ont été mis en chantier, dont pas un seul au cours des deux années les plus récentes. Or, durant les quatre mêmes années, la construction de 928 unités de condominiums a démarré dans le quartier. C’est 20 fois plus. Pendant ce temps, des logements locatifs existants continuent de disparaître en grand nombre, en raison de leur conversion en condos ». 

Tout comme le FRAPRU, le Comité logement du Plateau considère que seule la construction de nouveaux logements sociaux peut augmenter l’offre de logements locatifs à un loyer qui soit pleinement accessible aux locataires à revenu inférieur qui représentent une large part des locataires du quartier. Les deux organismes joignent leur voix pour réclamer que le gouvernement québécois annonce, dès son prochain budget, le financement de 50 000 nouveaux logements sociaux en cinq ans à l’échelle du Québec. « Parmi ces logements, 2400 pourraient se réaliser sur le Plateau Mont-Royal, alors qu’à peine 435 y ont été réalisés depuis le milieu des années 1990 », conclut Vicky Langevin.

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