À l’été 2003, au beau milieu de la pénurie de logements locatifs qui touchait alors très sévèrement le Québec, pas moins de 1 750 familles ou personnes avaient été reconnues par les autorités politiques comme sans logis ou à risque immédiat de le devenir. Dix ans plus tard, le problème n’a plus la même ampleur. Autour du 1er juillet dernier, le nombre de ménages en difficulté s’est plutôt situé autour de 300.
À l’échelle du Québec, le taux de logements inoccupés, qui, pendant plus d’une décennie, était largement sous le taux d’équilibre fixé à 3 %, le dépasse maintenant légèrement. La rareté de logements locatifs est maintenant confinée à des régions à fort développement économique comme l’Abitibi-Témiscamingue et la Côte-Nord. Est-ce à dire que la situation est désormais au beau fixe pour les locataires ? C’est loin d’être le cas.
L’abandon du logement locatif
La construction de nouveaux logements locatifs a tout d’abord chuté dangereusement au cours des dernières années. En 2012, elle est tombée à son plus bas niveau depuis 2001, avec la mise en chantier d’à peine 7 340 appartements à l’échelle du Québec. Sur l’île de Montréal, le nombre de mises en chantier n’a été que de 723, ce qui ne représente que 29 % du total atteint en 2007 et la situation s’annonce encore plus désastreuse en 2013, si on se fie aux résultats des sept premiers mois de l’année. Même si la construction d’unités de condominiums commence aussi à battre de l’aile, elle est néanmoins 13 fois plus élevée que celle d’appartements de location, à Montréal comme à Longueuil. Depuis le début de 2013, les mises en chantier de logements locatifs sont aussi en baisse dans les régions métropolitaines de Québec et de Gatineau
Si cette tendance se poursuivait, le Québec pourrait retomber en situation de pénurie. Le danger est d’autant plus grand que le logement social, qui a, pendant un bon moment, soutenu l’offre d’appartements, en particulier pour les familles, tourne carrément au ralenti. Selon des données de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, au Québec, le nombre de mises en chantier de logements coopératifs est passé de 1 080 en 2009 à 320 en 2012. Dans la région de Montréal, il a chuté de 710 à 73 !
Des loyers qui ont monté en flèche
La durée de la pénurie de logements locatifs a par ailleurs fait grimper les loyers. Si davantage de logements se retrouvent présentement vacants, le coût des appartements est beaucoup plus élevé qu’au début du millénaire.
Au Québec, le loyer moyen d’un logement de deux chambres à coucher a augmenté de 40 % entre l’automne 2000 et le printemps 2013, la hausse atteignant 47 % à Québec. Le coût moyen d’un 4 ½ y est maintenant de 763 $ par mois, ce qui en fait le plus élevé de toute la province. Pour payer un tel loyer sans y consacrer plus que la norme de 30 % de ses revenus, une famille monoparentale devrait gagner au moins 30 500 $ par année.
Dans la région de Montréal, le coût mensuel moyen des plus grands logements familiaux de trois chambres à coucher et plus a grimpé de 44 % pour se chiffrer à 907 $. Une famille devrait avoir un revenu d’au moins 36 280 $ pour ne pas se retrouver en péril avec un tel loyer.
Un parc de logements qui vieillit… mal
Un autre problème risque de prendre de plus en plus d’importance au fil des années et c’est la délabrement et l’insalubrité d’une partie grandissante du parc de logements locatifs. Le sujet fait d’ailleurs de plus en plus la manchette des médias. À Gatineau, il a été au cœur de l’actualité au printemps, 2013 en particulier autour de la grève de la faim du coordonnateur de Logemen’occupe, François Roy.
Le recensement canadien de 2006 nous apprenait déjà que 704 420 logements locatifs du Québec, représentant 56 % de ce parc, ont été construits entre 1920 et 1970. De ce nombre, 456 765 datent d’avant 1960. À Montréal, 70 % des logements locatifs ont plus de 40 ans et 46 % plus de cinquante. Il va de soi que des logements aussi âgés nécessitent des rénovations de plus en plus importantes auxquelles ne consent de toute évidence pas une large partie des propriétaires.